Médecins du travail : construction d'un outil pour évaluer les risques des sites pollués

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"Solex", c'est ainsi que doit être baptisé l'outil à destination des médecins du travail et des préventeurs pour aider à l'évaluation et à la prévention des risques des professionnels du BTP amenés à travailler sur des sites pollués.

La société de médecine du travail et d'ergonomie du sud de l'Ile-de-France (SMTE*) et la société Signaux Forts, spécialisée dans les stratégies de gestion des risques, sont à l'origine du projet "Solex". Constatant un besoin criant sur le terrain, ils ont monté un groupe de travail avec divers partenaires* et réunissant des professionnels de plusieurs horizons. Objectif : construire un outil simple et opérationnel permettant d'aiguiller le médecin du travail sur des chantiers tout-venant avec des entreprises peu habituées aux sites pollués.

Des médecins du travail, seuls et démunis

Pour bien comprendre la problématique, Alain Touboul, président de la SMTE, évoquent quelques cas concrets qui mettent en exergue les difficultés auxquelles sont confrontés les médecins du travail dans ces situations : "Généralement, sur ces chantiers tout-venants, on découvre la pollution du site au moment du chantier. Le médecin du travail est alors appelé, toujours en urgence, quand des ouvriers se plaignent, font des malaises ou que des choses vraiment inattendues arrivent (tel un jus jaune très odorant sortant de la terre). Il doit alors, en quelque jours et sur la base de documents inadaptés, faire un diagnostic des polluants mis en jeu, de l'exposition des ouvriers et des mesures de prévention / protection à mettre en oeuvre. Pour cela, il ne dispose pas de référentiel, d'outil dédiés et bien souvent d'aucune connaissance en la matière.

"Solex", un guide en 5 outils

A partir d'un diagramme d'aide à la décision, le groupe de travail, a identifié 5 outils qui pourraient être utiles au médecin du travail. Tout d'abord une grille de lecture et d'analyse des études de sols. Ces dernières sont réalisées pour l'usage futur du site et jamais pour les salariés, il faut donc savoir en tirer les informations intéressantes pour les ouvriers qui travailleront sur le chantier. Si elles n'existent pas, il faut aussi savoir où trouver une information minimale (dans la base de données Basias du BRGM sur les anciens sites industriels par exemple) ou à qui s'adresser pour une évaluation succincte et rapide si nécessaire.

La pollution dans le sol représente-t-elle un danger pour les salariés ?

Ensuite, question centrale, il faut pouvoir, à partir d'une concentration dans le sol (et non dans l'atmosphère) d'un ou plusieurs polluants, pouvoir évaluer le danger et les risques associés. Cette question a amené le groupe de travail à intégrer la collaboration de Franck Karg, président de la commission santé sécurité de l'UPDS (union des professionnels de la dépollution des sites). En effet, l'UPDS a élaboré un guide de suivi et de gestion des expositions chroniques pour l'ensemble des travailleurs du secteur avec des données précises. Ce guide qui doit être publié au cours de l'année 2010, devrait servir de base à l'outil Solex pour définir trois niveaux de risque : risque chimique faible ne nécessitant pas de précaution particulière, risque chimique faible à modéré nécessitant un avis complémentaire, risque fort à très fort nécessitant des protections adaptées voire un avis complémentaire.

Le médecin du travail peut aller jusqu'à faire arrêter un chantier

Par ailleurs, Solex doit aussi aider les médecins à trouver les textes réglementaires sur lesquels s'appuyer pour définir leur stratégie face à un cas donné et éventuellement comment argumenter leurs décisions, sachant qu'ils peuvent aller jusqu'à faire arrêter le chantier, une responsabilité importante. Un recueil de cas pratiques sera aussi mis à disposition pour illustrer les différentes options possibles.

Des formations nécessaires en parallèle

Une fois l'outil élaboré (prévision pour début 2011), des formations à destination des médecins ou des préventeurs seront proposées pour utiliser au mieux l'arbre décisionnel et les différents outils (Basias etc.). "L'aboutissement de cette démarche c'est finalement l'application de la règlementation avec un suivi de l'exposition des travailleurs, qui aujourd'hui, passent de chantiers en chantiers, exposés à des dizaines de polluants sans que personne ne le sache et sans qu'ils ne soient protégés." conclut ainsi Pascal Roux, de la société Signaux Forts.

* Une convention régit les travaux du groupe et les relations entre les personnes participant aux travaux : APST-BTP, ATC, OPPBTP, InVS-CIRE Idf, DRTEFP-IDF, SMTE, Signaux Forts, Chloé Touranchet.

 

Auteur : Par Sophie Hoguin, actuEL-HSE

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