AT/MP : l'absence de protocole de sécurité constitue une faute inexcusable

Classé dans la catégorie : Institutionnels

Les opérations de chargement et déchargement réalisées par une entreprise extérieure imposent un protocole de sécurité.

À défaut, la faute inexcusable de l'employeur sera automatiquement reconnue en cas d'accident, quelles qu'en soient les circonstances.

Parce que les opérations de chargement et déchargement effectuées par une entreprise extérieure sont des situations "à risques" en termes d'accidents du travail, la législation a renforcé les obligations patronales s'agissant d'assurer la sécurité des travailleurs. Des dispositions spécifiques fixent ainsi les règles de coordination et de prévention devant être observées (C. trav., art. R. 4515-1 à R. 4515-11). En particulier, les opérations de chargement ou de déchargement réalisées par des entreprises extérieures doivent faire l'objet d'un document écrit, appelé "protocole de sécurité" (lequel remplace le plan de prévention).

Échange entre employeurs

Ce protocole de sécurité recense les informations utiles à l'évaluation des risques générés par l'opération, ainsi que les mesures de prévention et de sécurité à observer à chaque étape. Le protocole de sécurité doit être établi dans le cadre d'un échange entre les employeurs intéressés, préalablement à la réalisation de l'opération. Dans une affaire récente, la Cour de cassation a estimé que le fait, pour un employeur, de ne pas avoir établi de protocole de sécurité, constituait, en soi, une faute inexcusable en cas d'accident du travail. Il s'agit donc d'une circonstance aggravante en termes de responsabilité patronale.

Le protocole de sécurité

Pour l'entreprise d'accueil, le protocole de sécurité doit au moins comprendre les informations concernant :

  • les consignes de sécurité, particulièrement celles qui concernent l'opération de chargement ou de déchargement ;
  • le lieu de livraison ou de prise en charge, les modalités d'accès et de stationnement aux postes de chargement ou de déchargement accompagnées d'un plan et des consignes de circulation ;
  • les matériels et engins spécifiques utilisés pour le chargement ou le déchargement ;
  • les moyens de secours en cas d'accident ou d'incident ;
  • l'identité du responsable désigné par l'entreprise d'accueil, auquel l'employeur délègue, le cas échéant, ses attributions.

Pour le transporteur, le protocole de sécurité décrit, notamment :

  • les caractéristiques du véhicule, son aménagement et ses équipements ;
  • la nature et le conditionnement de la marchandise ;
  • les précautions ou sujétions particulières résultant de la nature des substances ou produits transportés, notamment celles imposées par la réglementation relative au transport de matières dangereuses.

Comportement imprévisible

En l'espèce, une salariée avait eu le bras écrasé, derrière un camion, lors d'un déchargement de marchandises. En l'occurrence, le collègue qui était au volant du véhicule avait une grande responsabilité dans l'accident, puisqu'en effet, il avait été condamné au pénal pour blessures involontaires. Dans ces circonstances, l'entreprise de transports qui les employait estimait que sa propre responsabilité ne pouvait pas être engagée. Car, de fait, comment aurait-elle pu anticiper le comportement imprévisible de son salarié ? Dans un tel cas de figure, et même si le protocole de sécurité n'avait pas été établi, on ne pouvait pas lui imputer la responsabilité de l'accident.

Manquement grave

Mais pour les juges, le fait de ne pas avoir rédigé de protocole de sécurité constitue, en soi, une faute qui fait donc jouer la responsabilité patronale, peu important que, par ailleurs, des tiers aient eu un rôle dans la survenance de l'accident. Parce qu'une obligation essentielle a été méconnue par l'employeur au regard de son obligation de sécurité de résultat. Un manquement trop grave, aux yeux des magistrats, pour que la faute d'un salarié puisse en atténuer la portée.

La faute inexcusable de l'employeur

L'employeur commet une faute inexcusable lorsqu'il ne respecte pas les obligations de sécurité et de surveillance imposées par le code du travail. Ce principe a été maintes fois rappelé (dans d'autres affaires) par la jurisprudence. Un tel manquement rend l'accident du travail imputable à l'entreprise, sans qu'il faille rechercher si, en réalité, les conditions posées, au plan légal, pour la faute inexcusable, étaient bien réunies (on rappellera en effet que selon l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, la faute inexcusable suppose deux conditions : que l'employeur ait eu conscience du danger d'une part, et qu'il n'ait pas pris les mesures pour protéger son salarié d'autre part). Pour les juges, cette responsabilité « automatique » ne saurait être écartée, même en cas de faute d'un tiers.

Documents joints : Arrêt de la Cour de cassation 9 octobre.

 

 

Auteur : Par Laetitia Divol, Dictionnaire permanent Sécurité et conditions de travail, dans actuEL-HSE.

 

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