Risques : il n'y a pas de fumée sans feu, il faut tenir compte des signaux précoces

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En 2001, l'Agence européenne de l'environnement publiait "Signaux précoces et leçons tardives" - un rapport détaillant au XXeme siècle les technologies jugées dangereuses a posteriori et pour lesquelles les signaux d'alarmes avaient été ignorés. Voici le 2eme volume : 750 pages, 20 études de cas. De l'empoisonnement par le mercure industriel au Bisphénol A, des OGM aux nanos !

Le rapport de l'AEE est sans appel et réussit à regarder la problématique des risques sanitaires (au sens large) de manière globale, prenant en compte à la fois le contexte socio-économique, l'état des connaissances scientifiques ou la psychologie des différents acteurs. Vingt cas concrets et des leçons à tirer en matière de systèmes d'alerte et de gouvernance en général.

Ombres et pénombre

Le rapport s'appuie sur des cas pour lesquels les avertissements ont été ignorés ou écartés jusqu'à ce que les dommages pour la santé et l'environnement ne deviennent inéluctables. L'absence de réaction face aux alertes peut avoir plusieurs causes : profits à court terme au détriment de la sécurité du public, scientifiques minimisant les risques sous la pression de groupes d'intérêt, déni d'une catastrophe à laquelle on ne veut pas croire ou encore manque de recherche d'information... Le rapport analyse des cas où les dommages sont déjà avérés et s'attaque ensuite aux technologies posant aujourd'hui questions : téléphones portables, OGM, nanotechnologies.

Un monde trop grand et trop rapide ?

Et alors que le premier volume s'attachait au XXème siècle (1896 - 2001), ce second volume s'ancre dans le XXIe avec pour corollaire l'accélération de tous les processus. En effet, aujourd'hui plus que jamais les technologies sont approuvées plus vite que par le passé, et sont alors souvent propagées rapidement dans le monde entier. Les risques sont possiblement démultiplié et la possibilité d'émergence de la catastrophe aussi. L'ampleur des phénomènes et leur rapidité peut alors rapidement dépasser la capacité de la société à comprendre, reconnaître et réagir à temps pour éviter les conséquences néfastes.

Des améliorations possibles

Mais le rapport se veut optimiste et propose donc cinq histoires qui illustrent les avantages apportés par la rapidité de réaction en réponse aux signes avant-coureurs. Il suggère une plus large utilisation du "principe de précaution" afin de réduire les risques potentiels des technologies et produits chimiques novateurs insuffisamment testés. Il affirme que l'incertitude scientifique ne justifie en aucun cas l'inaction lorsqu'il existe des preuves plausibles de dommages potentiellement graves.

Il n'y a pas de fausses alertes

Les auteurs se sont aussi intéressés au mythe des "fausses alertes". En analysant 88 cas de prétendue «fausses alertes», ils n'en retiennent finalement que quatre. Par ailleurs, le document s'attache aussi à montrer que les mesures de précaution permettent souvent de stimuler plutôt que d'étouffer l'innovation.

Quatre grandes recommandations

  • Prendre en compte la complexité des systèmes environnementaux et biologiques, surtout lorsque de multiples causes peuvent être à l'origine de nombreux effets différents. Une approche plus holistique, englobant de nombreuses disciplines différentes permettrait également d'améliorer la compréhension et la prévention des dangers potentiels.
  • Les décideurs politiques devraient réagir aux signaux avant-coureurs plus rapidement, indique le rapport, en particulier dans le cas des technologies émergentes utilisées à grande échelles. Il propose que ceux étant à l'origine de futurs préjudices payent pour les dommages causés.
  • Améliorer l'évaluation des risques en adoptant l'incertitude de façon plus généralisée et en reconnaissant ce qui n'est pas connu. Par exemple, «aucune preuve de danger» a souvent été interprétée à tort comme signifiant «n'étant pas dangereux », alors même que des recherches pertinentes n'étaient pas disponibles.
  • Mettre en place de nouvelles formes de gouvernance impliquant les citoyens dans les choix effectués en matière d'innovation et d'analyses des risques.

 

Auteur : Par Sophie Hoguin, actuEL-HSE.

 
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Sur le même sujet : L'Agence européenne de l'environnement revient sur des scandales sanitaires passés afin de prévenir de nouveaux drames , par l'ETUI.

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