Une grille d’analyse pour anticiper les impacts humains des projets

Classé dans la catégorie : Général

Examiner au prisme de la qualité de vie au travail tous les projets pouvant induire des changements dans des situations de travail ? C'est ce que fait GRDF depuis quatre ans. Retour d'expérience.

La méthode s’appelle "Anticiper les impacts de nos projets sur la qualité de vie au travail des équipes concernées", et elle est formalisée par une note méthodologique datée de septembre 2011. Depuis quatre ans, le distributeur de gaz naturel GRDF applique à tous les projets susceptibles d’influer sur la qualité de vie au travail (QVT) de ses salariés une grille de lecture concrète, permettant d’identifier les impacts favorables et défavorables. Objectifs ? "Mieux adapter les changements et les accompagner", mais aussi "développer le dialogue social sur les projets".

Changements "rapides, nombreux et profonds"

Le développement de cette méthode découle du diagnostic sur les risques psychosociaux (RPS) produit en 2009, prolongé par un accord de prévention signé en février 2010. Au cours des négociations, un aspect ressort alors très fortement : l’impact sur l’organisation du travail et sur "les activités des salariés" des changements "rapides, nombreux et profonds" induits par "les évolutions du marché de l’énergie en France", récemment libéralisé, rapporte Christine Depigny-Huet, chargée de mission auprès du délégué prévention santé sécurité du groupe. La méthode est construite par les équipes de la direction des ressources humaines et de la transformation (DRHT), sous les deux angles de la santé au travail et du dialogue social.

Tous les projets

En pratique, il s’agit d’examiner, sous l’angle de la QVT, "tout projet pouvant induire des changements dans les situations de travail", qu’il s’agisse d’organisation, d’outils, de contenu, ou encore d’environnement, que les effets de ces évolutions soient durables ou temporaires, favorables ou défavorables. "La démarche concerne aussi bien des projets très locaux, comme le regroupement de deux équipes dans des locaux communs, que des projets nationaux, produisant des effets pour des milliers de salariés en France", précise Christine Depigny-Huet.

Délit d'entrave ?

Recommandée aux managers pour les décisions locales, la méthode est appliquée systématiquement pour tout projet donnant lieu à concertation avec les IRP (instances représentatives du personnel). Lesquelles n’ont jusqu’à présent jamais perçu sa mise en œuvre comme un délit d’entrave : "Il n’est pas exclu que cette question se pose un jour, avance prudemment la chargée de mission, mais les études d’impact sont plutôt appréciées par les élus. Elles permettent d’enrichir les échanges au sein des IRP, et surtout d’aborder l’activité réelle de travail des salariés concernés." Traduction pragmatique par Franck Sariège, délégué syndical central Force ouvrière : "Si la QVT permet d’obtenir quelque chose pour les salariés, nous utilisons la QVT."

Grille d’analyse

Quelle que soit l’échelle, l’étude est pilotée par l’acteur local le plus légitime – directeur, assistant de service social, médecin du travail… –, et associe toutes les parties prenantes, dans une démarche multidisciplinaire. Pour parvenir à un diagnostic "sans déni ni surenchère" – vœu pieux inscrit dans la note méthodologique –, l’analyse s’appuie sur une grille balayant les différents aspects de la QVT, offrant une trame concrète pour la réflexion. Chaque item est ainsi traduit sous forme de questions directes, appelant des réponses qualitatives plutôt qu’un scoring : "Le projet peut-il augmenter ou réduire les situations d’isolement géographique ou professionnel, la disponibilité d’appuis de proximité, la reconnaissance de ce que l’on fait, les possibilités d’échange sur le travail… ?", liste par exemple le chapitre sur les relations sociales et de travail.

Suites du diagnostic

L’outil constitue, selon Christine Depigny-Huet, un indéniable gage d’efficacité : "L’expérience montre que si l’on se contente des têtes de chapitres, les acteurs sont un peu démunis sur le terrain." Diagnostic en main, c’est enfin au responsable du projet qu’il revient de le modifier en conséquence, sur la base des actions préconisées par le groupe de travail. Si les impacts s’annoncent significatifs, l’ensemble est soumis au CHSCT, le chapitre RPS du document unique est révisé, et une nouvelle évaluation après six mois des effets des actions réalisées est transmise au CHSCT.

Compromis

Quatre ans après l’instauration de cette méthode, l’évaluation de ses effets est plus intuitive que formelle. D’après Christine Depigny-Huet, elle aurait notamment permis d’identifier des impacts jusqu’alors négligés dans la conduite des projets, comme par exemple ceux supportés par les salariés accueillant une nouvelle équipe dans leurs locaux à la suite d’un déménagement. Pas question cependant de "développer une approche maximaliste" en cherchant à supprimer absolument tous les désagréments : "Certains resteront irréductibles, par exemple la nécessité d’intervenir en horaires nocturnes pour assurer la mission d’urgence sécurité gaz", nuance ainsi la chargée de mission. Rappelant la définition de la QVT retenue par l’entreprise dans son accord social : "Le meilleur compromis entre les facteurs défavorables et favorables."

 

 

 

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