Réforme et financement des formations sécurité

Classé dans la catégorie : Institutionnels

La réforme de la formation professionnelle initiée par la loi du 5 mars 2014 a considérablement modifié les circuits de financements des formations en France.

Nous faisons le point avec un focus sur la spécificité des formations liées à la sécurité.

Plan de formation : une forte réduction des contributions entreprises

Concernant les entreprises de moins de 10 salariés rappelons que le système demeure inchangé : elles cotisaient et cotisent toujours 0.55 % de leur masse salariale à leur O.P.C.A. Le changement concerne donc essentiellement les entreprises de plus de 10 salariés : la ou auparavant, elles cotisaient entre 1.05 et 1.6 % de leur masse salariale (en fonction de leur taille), ce pourcentage s’élève désormais à 1 %, toute taille d’entreprise confondue.

En théorie, ce changement apparait donc comme un allègement significatif pour les entreprises de plus de 10 salariés. Mais comme d’habitude, le diable se niche dans les détails : en effet, la loi modifie aussi considérablement la part de ce pourcentage que ces mêmes entreprises pouvaient récupérer pour former leurs salariés comme le montre le tableau ci-dessous :

Avant Depuis 1er janvier 2015
Entreprise % globale de la masse salariale que versait l'entreprise à son OPCA dont % qu'elle pouvait récupérer pour former ses salariés Entreprise % globale de la masse salariale que versait l'entreprise à son OPCA dont % qu'elle pouvait récupérer pour former ses salariés
10 à 19 salariés 1,05% 0,9% 10 à 50 salariés 1% 0,2%
Plus de 20 salariés 1,60% 0,9% 50 à 299 salariés 1% 0,1%
Plus de 300 salariés 1% 0%
  • Premier exemple : une entreprise entre 10 et 19 salariés versait auparavant 1.05 % de sa masse salariale mais pouvait en récupérer 0.9 % pour former ses salariés. Elle en verse désormais 1 % mais en récupère seulement 0.2%, le reste allant vers des dispositifs sur lesquelles elle a peu ou pas de pouvoir de décision. Il ne lui reste donc plus que 0.2% au lieu de 0.9 pour financer les formations de ses salariés, sauf à faire un effort supplémentaire sur ses fonds propres.
  • Deuxième exemple : une entreprise de plus de 300 salariés qui dépensait 3 % de sa masse salariale pour la formation (soit plus que son obligation réglementaire) en versait 1.6% à son OPCA avant la réforme mais pouvait en récupérer 0.9%. Elle pouvait donc consacrer au total 2.3% pour la formation interne de ses salariés. Depuis le 1er janvier 2015, elle en verse 1% à son OPCA pour des dispositifs sur lesquelles elle a peu ou pas de pouvoir de décision mais ne peut rien récupérer. Admettons que cette entreprise veuille maintenir son effort global en formation de 3% sur 2015, il ne lui en reste donc plus que 2% (au lieu de 2.3) pour former ses salariés.

Conséquence : la réforme se traduit en réalité par une charge supplémentaire. Pour y faire face, soit les entreprises augmentent leur budget dédié à la formation, soit elles vont diminuer leur achat de formation. Cette dernière hypothèse semble malheureusement se confirmer en ce début d’année 2015.

Et les formations liées à la sécurité dans tout ça ?

Avant la réforme, les formations liées à la sécurité occupaient une place un peu hybride dans ce système de financement, certaines pouvant être prise en charge et d’autres non. De ce point de vue, la réforme a simplifié les choses : l’employeur devant désormais quasiment tout financer sur fond propre, il n’aura plus à se poser de questions pour savoir si une prise en charge par son OPCA est possible, les formations liées à la sécurité étant généralement obligatoire pour faire travailler un salarié (indépendamment des circuits de financements). Cela dit, même pour ce type de formation, on peut craindre une baisse de motivation de certains employeurs peu scrupuleux au vu de l’effort financier supplémentaire que nous évoquons plus haut.

Pour les particuliers : le Compte personnel de formation

Projet phare de la réforme, le nouveau dispositif Compte personnel de formation est normalement initié par le salarié (ou le demandeur d’emploi) ; l’employeur n’a pas la main sur ce dispositif ; celui-ci ne produira pleinement ses effets que dans 5 ans, le temps que les salariés en poste accumulent des heures sur leur compteur, même si une partie d’entre eux ont déjà des heures créditées, héritées de l’ancien dispositif « Droit individuel à la formation ». Enfin, il ne donne droit qu’à des formations longues et qualifiantes ne pouvant être choisi dans que dans des listes prédéfinies par plusieurs commissions (par exemple dans notre menu de recherche de notre page d’accueil, seule la formation CQP APS est financée par ce dispositif).

Cela dit, par exception, des modules courts sont envisagés par la loi 5 mars 2014 (art. L6323-6) pour un dispositif inédit : le socle de connaissances et de compétences (soit des notions de bases jugés indispensables pour une bonne insertion professionnelle). Le décret du 13 février 2015 donne des précisions en listant 7 compétences clés, dont une ayant trait à l’hygiène et à la sécurité : « La maîtrise des gestes et postures et le respect des règles d'hygiène, de sécurité et environnementales élémentaires » (art. D6113-2)

L’idée est à priori intéressante : un salarié pourrait donc mobiliser le dispositif Compte personnel de formation pour passer une habilitation électrique ou un Caces supplémentaire lui permettant de développer son employabilité pour un employeur actuel ou futur. Avec cette particularité, qu’à priori l’employeur ne peut s’opposer au déroulement de cette formation y compris sur le temps de travail.

Certains organismes de formation spécialisés en sécurité ont donc immédiatement communiqué sur cet aspect dès la promulgation du décret du 13 février 2015. Malheureusement cette communication semble un peu rapide quand on examine le décret d’un peu plus près. Si celui-ci détaille effectivement la liste de compétences-clés prévues par la loi, il laisse le soin à une commission, le « Comité paritaire interprofessionnel national pour l'emploi et la formation » d’en définir le programme, la certification et même les conditions d’évaluations. La réponse de comité aura été foudroyante : dès le 18 février, soit 5 jours après, elle prenait sa plus belle plume… pour demander à d’autres commissions de faire le travail par branche d’activité.

Conclusion : au vu du scénario ci-dessus, l'attentisme est de mise concernant l'utilisation du Compte personnel de formation. Y compris pour les formations longues diplômantes pour lesquelles, il semblerait qu'une seule entrée en formation ait eu lieu depuis le 1er janvier 2015...

En partenariat avec : formation-securite.net.

formation-securite.net est le portail internet dédié aux formations réglementaires et de sécurité.

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