Dossier de l'INRS : Propreté, un secteur engagé

Établir une culture de prévention dans les entreprises, telle est l'ambition affichée de la branche propreté, déjà investie depuis dix ans sur la prévention des troubles musculosquelettiques (TMS), en lien avec l'Assurance maladie-risques professionnels. Formation-action, améliorations techniques, démarches concertées avec le client... Des actions sont menées à tous les niveaux.

Plus de 12 000 entreprises, dont 80 % ont moins de 10 salariés. 15 milliards d'euros de chiffre d'affaires, 520 000 salariés, 12 000 créations d'emplois par an en France... Les chiffres donnent le vertige. La propreté est un secteur qui recrute, même s'il souffre encore d'un déficit d'image. Selon la fédération des entreprises de propreté (Fep), 6 000 jeunes sont actuellement en formation initiale. L'une des particularités du secteur est de travailler chez l'autre, dans des lieux qui ont souvent été conçus sans appréhender le travail réel et les besoins des agents de propreté. Il est donc nécessaire que le client prenne en compte les activités de nettoyage, ainsi que la coactivité, pour mieux évaluer et prévenir les risques. À cet effet, un plan de prévention concerté entre le client et l'entreprise prestataire doit être établi.

Mobiliser avec un discours commun sur la prévention des TMS

Les métiers de la propreté sont des métiers physiques. Et aux sollicitations biomécaniques s'ajoutent des contraintes liées notamment aux caractéristiques de l'environnement ou à l'organisation du travail. Les salariés sont en contact avec des produits chimiques, la poussière, dans des espaces de travail plus ou moins grands, souvent en horaires décalés. Les troubles musculosquelettiques (TMS) représentent 96 % des maladies professionnelles reconnues du secteur. C'est pourquoi, dès 2010, la fédération des entreprises de propreté s'est engagée dans un ambitieux programme national de prévention des TMS. Compte tenu de la grande disparité des entreprises - une dizaine de majors pour une multitude de petites - et des degrés de maturité variables sur le sujet, l'enjeu était de mobiliser avec un discours commun. Ce programme de prévention a donné lieu à l'élaboration de deux guides, l'un destiné aux donneurs d'ordres, l'autre aux concepteurs de bâtiments. Il s'est également appuyé sur un dispositif de formation-action, bâti en lien avec la Cnam et l'INRS, visant à sensibiliser et former tous les acteurs de l'entreprise, du dirigeant aux chefs d'équipe et à l'agent de propreté. Le tout visant à favoriser la construction d'un plan d'actions pérenne de prévention des TMS au sein des établissements. En parallèle, l'Assurance maladie-Risques professionnels a mis en place des subventions pour permettre aux chefs d'entreprise d'investir et protéger leurs salariés. Propreté +, une aide financière proposée aux entreprises de moins de 50 salariés, est destinée par exemple au financement de matériels manuels, d'équipements mécanisés et de prestations de formation. Les entreprises de propreté ciblées par le programme national de prévention TMS Pros ont pu être accompagnées dans l'identification et la connaissance des risques, notamment avec le dispositif de formation-action.

Vers une approche globale des risques

Avec l'Inhni, organisme de formation, et les organismes habilités pour dispenser les certificats de qualification professionnelle du secteur, la fédération a formé 9 000 Acteurs prévention secours Propreté (APS Propreté), salariés et chefs d'équipes et plus de 700 Animateurs prévention des TMS (APTMS). Ces derniers ont vocation à animer et mettre en oeuvre une démarche de prévention, basée sur une analyse de l'activité réelle des salariés intervenant sur les sites. Dans la continuité, un module animateur prévention propreté est désormais proposé. Il est basé sur une approche globale de la santé et sécurité au travail, au-delà du seul prisme des TMS. Une offre de formation à distance est également en préparation pour les petites entreprises. La Fep a mis en place un référentiel de bonnes pratiques et propose de nombreux outils sur son site internet. Notamment pour l'aide à l'établissement du document unique, l'évaluation du risque chimique des produits utilisés, ou le diagnostic des bonnes pratiques de management de la santé et la sécurité au travail. Des fiches d'évaluation font le point sur les principaux risques rencontrés : TMS, risque chimique, risques psychosociaux, risque routier, chute de plain-pied, chute de hauteur, risque électrique, risque thermique et sonore ou encore risque de coup, coupure et piqûre. Il s'agit désormais de faciliter l'appropriation de méthodes et d'installer une culture prévention dans les entreprises, afin qu'elles s'inscrivent dans une démarche d'amélioration continue.

Horaires décalés : une réalité

Enfin, parmi les évolutions souhaitées, la promotion du travail en journée et en continu est plus que jamais d'actualité. En effet, 70 % des prestations ont encore lieu en décalé. Parmi les freins : les habitudes des clients, qui conçoivent parfois mal l'intervention des agents en présence de leurs collaborateurs, ou des salariés eux-mêmes. Or le travail continu en journée permet de réduire la fragmentation de l'activité et le travail isolé. Sa mise en place, qui progresse malgré tout, nécessite communication et concertation entre le client et le prestataire autour des enjeux : garantie d'une propreté en continu, amélioration des conditions de vie des agents, meilleure connaissance des attentes des occupants, adaptation de l'activité aux besoins, valorisation du travail. Et les expérimentations menées jusqu'ici convergent pour dire que les bénéfices sont nombreux. Côté entreprises ou côté salariés.

Panorama de la propreté

83 % des contrats sont en CDI. L'âge moyen est de 46 ans. 32 % des salariés sont de nationalité étrangère. 61 % à temps partiel. Un tiers travaillent dans plusieurs entreprises. L'article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté garantit par ailleurs aux salariés affectés sur un marché la continuité du contrat de travail : ils peuvent conserver leur poste en n'étant plus salariés de la société sortante, mais de la société entrante. Les interventions dans les bureaux représentent 40 % du chiffre d'affaires du secteur. D'autres ont lieu dans des domaines très spécifiques, comme l'industrie ou la santé, et nécessitent un savoir-faire partagé avec le client.

La méthode d'analyse de la charge physique de travail

L'origine multifactorielle des TMS impose de s'inscrire dans une démarche structurée impliquant l'analyse globale de la situation de travail, menée de façon participative et pluridisciplinaire avec l'ensemble des acteurs : salariés, encadrement, représentants du personnel, ressources extérieures (Carsat, services de santé au travail...). La méthode d'analyse de la charge physique de travail (ED6161, INRS) peut aider les entreprises du secteur et propose de suivre cinq indicateurs pour définir ensuite les priorités d'action de prévention :

  • les efforts physiques (port de charges, manutentions manuelles...) ;
  • le dimensionnement du poste (postures, circulations, espace...) ;
  • les caractéristiques temporelles (travail répétitif, cadences, récupération...) ;
  • les caractéristiques de l'environnement (ambiance physique, vibration, utilisation d'aides techniques...) ;
  • l'organisation (objectifs de production, autonomie, entraide...).

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