Artistes, décorateurs, techniciens... Les métiers du spectacle vivant

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La grande variété des risques professionnels auxquels sont exposés les salariés du spectacle vivant est le parfait reflet de la diversité de ses métiers (artistes, techniciens, décorateurs, costumiers, accessoiristes...). Si certaines structures ont compris l'intérêt de mettre en place une démarche de prévention, d'autres, que ce soit par méconnaissance ou méfiance, ne se sont pas encore lancées. Explications.

Si dans l'inconscient collectif les métiers du spectacle vivant sont synonymes de plaisir et de légèreté, la réalité est pourtant bien plus prosaïque quand la question des risques professionnels est abordée. En effet, les décorateurs et les accessoiristes sont notamment confrontés à des risques physiques lorsqu'ils travaillent les matériaux bruts à l'aide de machines et d'outils. Ils doivent se préoccuper des poussières de bois, des copeaux de métal ou des fumées de soudage. Il leur faut se protéger des solvants présents dans les colles, les peintures ou les vernis. Les techniciens qui installent les décors, les lumières ou la régie sont particulièrement exposés aux risques liés aux manutentions. Des tâches qui peuvent aussi les amener à travailler à plusieurs mètres du sol. Ce sont les chutes de hauteur qu'il s'agit alors d'éviter. Les troubles musculosquelettiques (TMS) peuvent apparaître chez les costumiers qui, lorsqu'ils cousent à la main, effectuent des gestes répétitifs. Les TMS touchent aussi les danseurs ou les musiciens. Ces derniers sont également particulièrement exposés au risque bruit, tout comme les salariés des salles de concerts. Les métiers du spectacle vivant ne sont pas non plus épargnés par les risques psychosociaux (RPS), le travail en horaires décalés et les addictions (tabac, alcool, cannabis ou autres stupéfiants).

Un réflexe prévention pas systématique...

Qu'il s'agisse d'utiliser des dispositifs de manutention pour préserver les corps, d'aspirer une pollution à la source, de substituer un produit dangereux par un autre plus respectueux de la santé, de travailler sur l'ergonomie des postes, d'adopter la bonne posture pour jouer de son instrument ou de revoir l'organisation horaire du travail, par exemple, des solutions de prévention existent. Alors que certaines structures s'en emparent, à l'autre bout du spectre, d'autres ignorent tout du document unique (DU). Selon une enquête menée auprès de ses adhérents par le CMB, service interentreprise de santé au travail, en 2010, 20 % d'entre eux avaient réalisé leur DU. Des chiffres qui s'expliquent notamment par les caractéristiques du panel, principalement composé de TPE. Car la taille des entreprises joue souvent un rôle dans leur appropriation des questions de prévention. Même quand la question les préoccupe, les petites structures manquent de temps, de connaissances ou tout simplement d'un lieu à elles pour agir en ce domaine. En revanche, les grandes ayant plus de moyens humains, techniques et financiers, sont plus à même de développer des actions de prévention.

Autre facteur à prendre en compte, le caractère passionnel de la relation que les professionnels du spectacle entretiennent avec leurs métiers. Les contraintes n'étant pas vécues comme telles, elles sont souvent acceptées, voire valorisées. Par exemple, la conception selon laquelle la souffrance est utile à leur art est bien ancrée chez les danseurs ou les acrobates. L'acceptation du dépassement de ses limites trouve également sa source dans la vision quasi sacrée du lever de rideau. Celui-ci doit avoir lieu à tout prix. Premièrement car c'est un engagement vis-à-vis du public et deuxièmement, pour les petites structures, c'est souvent une question de survie. Des spectacles annulés peuvent être très durs à assumer d'un point de vue économique, ce qui pousse les salariés à ne pas s'arrêter s'ils sont malades.

L'intensification de l'activité à l'approche des représentations amène les techniciens, décorateurs et costumiers à effectuer, à force d'heures supplémentaires, des amplitudes horaires plus que conséquentes entraînant une augmentation des risques d'accident et brouillant la frontière entre vie privée et professionnelle. Enfin, il existe une réticence de certains professionnels vis-à-vis de la prévention, car ils craignent que celle-ci ne se fasse au dépens de leur art. Ainsi, les demandes des préventeurs se heurtent parfois aux desiderata de metteurs en scène, par exemple.

Vers une structuration de la prévention ?

Il reste donc du chemin à parcourir et, pour faire avancer les choses dans la bonne direction, une professionnalisation des responsables de la sécurité au travail est souhaitable. Car à l'heure actuelle, il existe peu de postes dédiés de responsable HSE dans les structures culturelles. Ces prérogatives sont donc souvent redistribuées aux administrateurs, aux directeurs techniques ou artistiques... En attendant une professionnalisation à grande échelle qui permettrait d'intégrer la prévention comme un axe à part entière de toute création artistique, la nouvelle génération de directeurs techniques est davantage impliquée que les précédentes. Contrairement aux anciens souvent formés sur le terrain, ils ont appris leur métier dans des écoles qui abordent dans leur programme les questions de sécurité.

En outre, des acteurs comme le syndicat national des prestataires de l'audiovisuel scénique et événementiel (Synpase), l'association Apsarts, ou le CMB, pour n'en citer que quelques-uns, agissent pour permettre à une culture de s'enraciner dans le milieu du spectacle. Ils organisent des colloques, mettent en place des formations, éditent des brochures pour sensibiliser et accompagner les professionnels du secteur.

Ainsi, malgré des obstacles à surmonter, les métiers du spectacle vivant sont à un tournant de leur histoire. Certaines structures ont déjà fait leur révolution en intégrant la prévention à leur fonctionnement et tentent activement de convaincre leurs pairs qui n'ont pas sauté le pas qu'ils ont tout à gagner à se jeter à l'eau.

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