Impact des outils numériques sur les conditions de travail

Classé dans la catégorie : Général

Plus que l’outil c'est son usage qui compte.

Depuis la fin des années 1990, les technologies de l’information et de la communication (TIC) se sont progressivement généralisées dans les entreprises. Ainsi, en 2013, 71,1% des salariés utilisaient déjà à un matériel informatique ou un réseau numérique dans son travail quotidien, soit une augmentation de 11,4 points depuis.

Ambivalence des outils numériques

Cet essor a bien sûr modifié en profondeur nos façons de travailler si bien que leur impact sur les conditions de travail fait débat. En effet tandis que certains experts mettent en avant le surcroît d’autonomie et de communication permis par ces outils, d’autres estiment qu’ils renforcent l’exposition des travailleurs à plusieurs risques psychosociaux comme, par exemple, le travail dans l’urgence, la surcharge informationnelle, le débordement de la vie professionnelle sur la vie privée.

Afin d’éclairer ce débat, les experts de la Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) du Ministère du Travail s’est plongée dans les nombreuses données recueillies par l’enquête Conditions de travail de 2013. Leur analyse aboutit à distinguer les situations vécues par cinq grands types d’utilisateurs des outils numériques : “les utilisateurs non connectés, les utilisateurs mobiles, les utilisateurs connectés peu intensifs, les utilisateurs connectés modérés et les utilisateurs connectés intensifs”. Cette typologie souligne que l’impact sur les conditions de travail diffère sensiblement selon les matériels et selon l’usage qui en est fait.

Le cas des travailleurs mobiles

Le cas des utilisateurs mobiles est, à cet égard emblématique. En effet, ces derniers, très fortement équipés en outils numériques sont tout à la fois ceux qui bénéficient le plus de l’effet “autonomie” et les plus exposés aux risques qui y sont associés. Ainsi, ils ont “plus de marges de manœuvre pour la réalisation de leurs tâches et l’organisation de leur travail” et “sont moins soumis à l’application stricte de consignes que les autres”. En revanche, “ils apportent plus souvent du travail à la maison ou sont plus souvent contactés en dehors de leurs heures de travail. Ce débordement d’horaires s’accompagne d’un débordement cognitif, les utilisateurs mobiles déclarant deux fois plus souvent penser à leur travail quand ils n’y sont pas.”

Les outils numériques ne seraient donc ni bons ni mauvais par essence. “Les outils d’information et de communication s’insèrent dans des formes d’organisation du travail et des contextes spécifiques à l’entreprise. Selon la stratégie de l’entreprise, un même outil numérique peut être utilisé pour atteindre des objectifs différents, par exemple comme outil de contrôle de l’activité ou comme outil collaboratif. L’usage d’un outil numérique peut donc avoir des effets bénéfiques sur l’activité et sur les conditions de travail. Mais cet usage est susceptible d’accroître les risques professionnels dans d’autres contextes”, notent les auteurs.

L'évaluation des risques : une école du réel

Cette remarque ne constitue pas seulement un appel à dépasser l’opposition stérile entre technolâtres et technophobes. Elle a une portée plus vaste : dans l’évaluation des risques professionnels, il faut toujours se garder des jugements péremptoires, des a priori de toutes natures et des affirmations à caractère général et définitif. Ainsi, le recueil d’informations statistiques peut bien sûr éveiller l’attention et orienter l’action, mais il doit toujours être complété par une prise en compte fine de la situation spécifique de chaque entreprise et de chaque unité de travail. Évaluation et prévention des risques sont des écoles du réel.

Pour aller plus loin : “Quels liens entre les usages professionnels des outils numériques et les conditions de travail ?”, Dares Analyses n° 29, juin 2018.

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