Métiers de la beauté : embellir sans souffrir

Coiffure, esthétique, tatouage... la beauté est un secteur qui regroupe une grande variété d'activités.

En termes de risques liés au travail, les professionnels concernés font face à des problématiques communes : les troubles musculosquelettiques (TMS) en premier lieu, mais aussi l'utilisation de produits chimiques dont certains présentent des risques pour la santé. Ils exercent très souvent dans des petites entreprises, et l'accès à l'information concernant les risques professionnels se révèle être un enjeu majeur.

La coiffure, en France, ce sont 97 000 salariés pour 45 000 entreprises en 2016. Les soins esthétiques (soins du visage, des mains et des pieds, soins corporels...), près de 52 000 salariés pour 60 000 entreprises. Le tatouage, 4 000 à 5 000 personnes. Les entreprises du secteur de la beauté ont peu ou pas de salariés. Souvent, la prévention des risques professionnels est un sujet bien éloigné de leurs préoccupations quotidiennes.

Dans les entreprises du secteur de la beauté, le taux de reconnaissance de maladies professionnelles - majoritairement des troubles musculosquelettiques (TMS) - est aussi important que dans les autres secteurs - voire davantage, dans le cas des coiffeurs. Selon la Cnam, en 2016, ce taux était de 6,39 ‰ chez ces derniers. Face à ces constats, l'Assurance maladie-risques professionnels et les organisations professionnelles de ces secteurs ne sont pas restées inactives. Depuis 2013, plus de 1 400 salons de coiffure ont bénéficié d'aides financières simplifiées pour l'achat de matériel limitant l'apparition de TMS : fauteuils réglables en hauteur - évitant au coiffeur de se pencher lors de shampooings -, ciseaux ergonomiques et sèche-cheveux légers, limitant les contraintes au niveau de l'épaule.

Des allergies plutôt fréquentes

Chez les coiffeurs toujours, les cas d'allergies reconnus comme maladie professionnelle sont plus fréquents qu'ailleurs : en 2016, la coiffure regroupait plus d'un eczéma allergique sur quatre et près de 14 % des affections respiratoires (asthmes, rhinites). Les substances en cause se trouvent essentiellement dans les produits de coloration (allergies cutanées) et les poudres de décoloration (allergies respiratoires). Les salariés des instituts de beauté et des salons de manucure ne sont pas non plus épargnés par les allergies, majoritairement cutanées dans leur cas.

Dans les salons de coiffure ou de manucure ainsi que dans les instituts de beauté, éliminer les substances en cause n'est pas chose aisée. Les allergènes, tout comme les substances irritantes, cancérogènes, mutagènes ou reprotoxiques (CMR) pouvant entrer dans la composition des produits, ne sont pas facilement identifiables. Les fiches de données de sécurité ne sont pas obligatoires pour les cosmétiques. Des organisations professionnelles - la Confédération nationale de l'esthétique parfumerie et la Fédération des entreprises de la beauté - ont élaboré en 2016 un guide identifiant les risques associés à chaque type de produits utilisés dans la manucure, les soins des pieds ou la prothésie ongulaire, ainsi que les mesures de prévention à mettre en place.

En termes d'exposition à des produits chimiques présentant un risque pour la santé, les soins et la décoration de l'ongle ont été particulièrement montrés du doigt. Un rapport publié en 2017 par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a mis en lumière les risques professionnels liés à ces activités. Ce travail d'expertise a identifié près de 700 substances dans la composition des produits utilisés ou dans les atmosphères de travail, dans 28 salons proposant exclusivement ce type de prestation. Une soixantaine d'entre elles sont jugées « très préoccupantes » par l'Agence, notamment des CMR, des substances sensibilisantes et/ou inscrites sur une liste de perturbateurs endocriniens potentiels.

Le règlement européen régissant les cosmétiques (règlement (CE) N° 1223/2009) prévoit pourtant que les produits doivent être sans risque pour l'utilisateur final, que ce dernier soit un consommateur ou un professionnel. Il interdit la présence de substances CMR dans les produits cosmétiques mais il existe des dérogations. Afin d'améliorer la protection des salariés vis-à-vis du risque chimique, l'Anses préconise l'utilisation de captage à la source des substances volatiles et des poussières, et le port d'équipements de protection individuelle adaptés (gants résistants aux solvants utilisés, à changer fréquemment...). Le rapport de l'Anses relève par ailleurs que la moitié de ces professionnels reconnaît ne pas avoir été sensibilisée aux risques spécifiques à leur activité.

Également souligné par le rapport : les TMS sont fréquemment diagnostiqués chez les prothésistes ongulaires. On retrouve plus particulièrement des troubles liés à des postures assises prolongées. Des sièges réglables en hauteur et assurant un bon maintien lombaire sont efficaces pour les limiter. Des TMS sont aussi liés aux mouvements répétitifs de la main, du poignet ou de l'avant-bras et peuvent être accentués par les vibrations d'outils, utilisés par exemple pour le polissage de l'ongle. L'utilisation d'appareils légers, avec une prise en main adaptée à la morphologie de l'utilisateur, contribue à réduire ce type de troubles.

Chez les tatoueurs aussi, les TMS commencent à faire couler de l'encre. Une étude publiée en 2017 s'est intéressée pour la première fois à l'état de santé chez ces professionnels en France : une majorité d'entre eux se plaignent de douleurs dorsales. La sensibilisation à ces risques n'est pas encore inscrite au programme de la formation obligatoire depuis 2008 pour pratiquer le tatouage et le piercing. On observe que les tatoueurs sont toutefois de plus en plus nombreux à s'équiper en sièges ergonomiques. C'est le risque de contamination par des agents biologiques (VIH, virus des hépatites) à la suite d'une piqûre d'aiguille qui a jusqu'ici focalisé l'attention de la profession. Pour limiter le risque de piqûre au moment de jeter l'aiguille, geste où il est le plus élevé, il existe des buses de tatouage munies de système d'aiguille rétractable. Il reste encore pas mal de chemin à parcourir mais la prise de conscience progresse.

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