Horaires atypiques : Rester vigilant

Un dossier de l'INRS

Travail de nuit, horaires flexibles, "3x8 ", temps partiel, journées morcelées… Les horaires dits atypiques sont-ils en passe de se généraliser ? Selon une récente étude de la Direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES), ces modes d'organisation concerneraient aujourd'hui près de 2 salariés sur 3. Ces rythmes de travail hors normes ne sont pas neutres en termes de santé et de sécurité. Ils peuvent être en effet à l'origine de risques spécifiques. Explications.

Avec l'intensification du travail, les rythmes de production et les organisations ont évolué. Dans de nombreuses entreprises, le découpage classique du temps de travail (5 jours travaillés, horaires réguliers et compris entre 7 h et 20 h, repos les jours fériés) tend à disparaître pour laisser place à un fonctionnement 24 h/24. Les travailleurs ont dû s'adapter à ces évolutions. Aujourd'hui, les horaires standards ne le sont plus. Les deux tiers des salariés, essentiellement les ouvriers et les employés, travaillent désormais selon des horaires dits "atypiques". Ce terme générique cache de multiples réalités. Il peut en effet s'appliquer aux horaires (de 20 h à 7 h du matin), aux périodes travaillées (samedi, dimanche et jours fériés), aux amplitudes de journée (au-delà de 8 h), à la structuration ! des journées (journées fragmentées par des coupures de plusieurs heures), ou encore aux rythmes de travail (variations irrégulières ou cycliques du nombre de jours ou des horaires de travail).

Gare aux accidents

Les horaires atypiques, et tout particulièrement le travail de nuit, peuvent constituer un facteur de risque pour les travailleurs. L'organisme est programmé pour avoir une activité maximale dans la journée et minimale durant la nuit. La perturbation du rythme biologique peut se manifester par l'apparition de troubles du sommeil. La dette de sommeil, lorsqu'elle devient chronique, entraîne une baisse de vigilance qui surexpose les salariés au risque d'accidents. Les accidents de la route entre le lieu de travail et le domicile constituent le principal danger. Les statistiques montrent par ailleurs que les accidents de travail, s'ils ne sont pas plus fréquents, sont généralement plus graves lorsqu'ils surviennent la nuit.

Un agent cancérogène

Les horaires atypiques favorisent aussi l'apparition de certaines pathologies (troubles digestifs, stress, syndromes dépressifs, maladies cardiovasculaires) et contribuent à l'usure prématurée des salariés.... Leurs effets peuvent être retardés. Des études révèlent que, même plusieurs année après, l'état de santé des ouvriers ayant travaillé de nuit ou en "3x8" est inférieur à celui de ceux qui ont toujours eu des horaires standards. Par ailleurs, des enquêtes réalisées chez les infirmières et les hôtesses de l'air ont montré que le travail de nuit sur des longues durées augmentait les risques de cancer du sein. Depuis 2007, le travail de nuit figure parmi la liste des agents cancérogènes établie par le Centre international de Recherche sur le Cancer (CIRC).

Des salariés inégaux face aux risques

Cependant, la probabilité de survenue de ces effets délétères varie selon les individus. La bonne acceptation des horaires atypiques par les salariés réduit sensiblement les risques. Cette acceptation est éminemment subjective. Elle dépend de la situation familiale, de la nature des activités extraprofessionnelles, des ressources matérielles et des aides disponibles dans la vie privée (possibilité de garde des enfants...), de la stabilité et de la prévisibilité des horaires... Quand certains salariés vivent les horaires atypiques comme une contrainte, d'autres peuvent au contraire y trouver un épanouissement personnel et professionnel.

Lors de la mise en place d'horaires atypiques, l'employeur doit procéder à une évaluation des risques liés aux postes concernés, et s'assurer que les mesures de prévention déjà mises en place restent adaptées pendant les horaires atypiques. Les salariés doivent, dans la mesure du possible, être associés aux discussions concernant les modalités des horaires (heure de prise de poste, rythme de rotation, temps de pause...). L'objectif est de parvenir à un compromis acceptable entre les préoccupations personnelles et les impératifs de production. Dans les entreprises où coexistent plusieurs types d'horaires, il est bien sûr préférable d'attribuer les plannings atypiques aux travailleurs qui se portent volontaires. L'encadrement doit également veiller à prévoir des marges de manœuvre pour les échanges d'horaires entre salariés. Des adaptations de l'environnement de travail sont parfois nécessaires : optimisation de l'éclairage, rapprochement des postes de travail pour éviter l'isolement, aménagement d'espaces de repos... Les services de santé au travail ont également un rôle important à jouer. Outre le suivi médical des salariés concernés, ils sont les plus à même de leur prodiguer les conseils relatifs notamment à l'hygiène de vie (sommeil, alimentation...) qui permettront de concilier au mieux leurs contraintes personnelles et professionnelles.

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