Les chiffres résultant de l’étude réalisée par l’INRS, en collaboration avec Arts et Métiers Paris Tech, incluent le coût des soins et la perte de richesse pour cause d’absentéisme, de cession prématurée d’activité et de décès prématuré. Ils constituent une évaluation a minima. Explications.
Interview
Christian Trontin, Chargé de recherche INRS
Agir Mag : Vous précisez qu’il s’agît d’une « évaluation a minima
». Pourquoi ?
Christian Trontin : Car nous n’avons pris en compte qu’un facteur
de stress : le job strain (travail en tension) qui combine une forte
pression subie au travail (avec des tâches réalisées à cadence rapide et
soumises à des échéances serrées) et l’absence d’autonomie dans
l’organisation au travail, dans le choix des méthodes de travail et dans
l’ordre des tâches à réaliser. Or, il existe bien d’autres sources de
stress mais avec trop peu d’études quantitatives. Toujours par souci de
rigueur scientifique, parmi les nombreuses pathologies liées au stress,
nous n’avons retenu que celles ayant fait l’objet d’un nombre d’études
suffisant : les maladies cardio-vasculaires, certains TMS (épaules, cou
et lombalgies) et les dépressions qui sont d’ailleurs les plus chères à
prendre en charge. Ce choix renvoie à la nécessité de disposer
d’enquêtes ou d’études épidémiologiques suffisamment nombreuses et
solides pour évaluer l’importance du « job strain » ainsi que la part
des pathologies qui lui est attribuable.
Agir Mag : Le coût estimé entre
1,9 et 3 Mds € s’appuie sur quels postes ?
C. T. : Il repose sur le coût des pathologies (coût des soins
évalués à partir des données de l’assurance-maladie), le coût des pertes
de production liés à l’absentéisme (mesuré à partir des jours d’arrêt),
aux décès prématurés et aux cessations prématurées d’activités (liées à
une mise en invalidé ou une dispense de recherche d’emploi après 50
ans). Rappelons que ces coûts sont pour une part supportés par la
Sécurité sociale, qui prend en partie en charge les soins, l’absentéisme
et les retraites anticipées.
Agir Mag : Quel est votre point
de vue sur le « bon » et « mauvais » stress ?
C. T. : Scientifiquement, il n’y a ni « bon » ni « mauvais »
stress, mais plutôt un phénomène d’adaptation du corps rendu nécessaire
par l’environnement. Si l’on demande un coup de collier parce qu’il y a
un afflux de commandes durant une à deux semaines, et que l’on revient
ensuite à un niveau d’acticité normale, cela est gérable. Mais ce
système n’est pas tenable à long terme. Le stress devient préjudiciable
et délétère lorsqu’on est systématiquement dans cet état de «
suractivité ». On parle alors de « stress chronique ». C’est là, quand
le corps ne peut plus revenir à un état initial de repos, qu’on voit se
développer certaines pathologies, mais aussi des situations de
compensation par la consommation d’alcool, de psychotiques, de tabac,
etc.
Source : Agir-mag.com