Télétravail imposé : postures statiques prolongées et RPS

La deuxième vague de la pandémie de Covid-19 est arrivée, nous obligeant à nous confiner une nouvelle fois. Pour tout salarié dont les missions le permettent, le télétravail redevient la norme. Le retour des postures inconfortables et prolongées doit s’accompagner de bonnes pratiques pour prévenir les risques auxquels elles les exposent. De plus, le travail à domicile favorisant l’isolement et la perméabilité entre vie professionnelle et vie privée, les risques psychosociaux guettent, eux aussi, les travailleurs.

Au printemps 2020, la crise sanitaire engendrée par la Covid-19 poussait la France à se confiner. Pour maintenir leurs activités, de nombreuses entreprises ont eu recours au télétravail. Imposé, celui-ci se différenciait du télétravail régulier parce qu’il était obligatoire, à temps plein, à domicile, sans possibilité de recours à un tiers lieu, et parfois avec l’obligation de s’occuper des enfants. La fin de ce premier confinement en mai dernier avait autorisé le retour sur site, plusieurs jours par semaine pour certains, à temps plein pour d’autres. Mais, depuis le 30 octobre, le reconfinement induit par la brutalité de la deuxième vague de la pandémie a tout remis en cause. Bon nombre de salariés se retrouvent donc à nouveau à 100 % à domicile.

Un aménagement non adapté du poste de travail informatique (absence de clavier et de souris déportés, installation sur table de repas ou table basse de salon avec un siège non prévu pour cet usage et non réglable), génère des contraintes posturales ou articulaires pouvant aboutir à l’apparition de troubles musculosquelettiques (TMS). Pour s’en prémunir, l’espace de travail doit être configuré en suivant les mêmes préconisations que celles pour concevoir un poste de travail sur écran au bureau : mobilier et équipement adapté, écran positionné à hauteur des yeux, éclairage suffisant... Le télétravail entraîne aussi des risques accrus de posture assise ou allongée associée à une très faible dépense énergétique pouvant entraîner des effets néfastes sur la santé si cela se prolonge : augmentation des risques d’infarctus du myocarde, d’accident vasculaire cérébral, de troubles métaboliques comme le diabète de type 2, de maladies cardiovasculaires (hypertension artérielle, insuffisance cardiaque, accidents vasculaires cérébraux…), de cancers, problèmes de santé mentale (dépression…) ou encore obésité. Si ces pathologies résultent de périodes quasi-statiques longues, des désordres physiologiques peuvent toutefois être observés dès les premières semaines de réduction du niveau d’activité physique associée à la position assise. Des études ont par exemple montré qu’une augmentation de 15 % du temps passé assis au cours de la journée pouvait induire au bout d’une semaine seulement, des perturbations métaboliques telles qu’une modification de l’activité de l’insuline. En passant de 10 000 à 1 500 pas journaliers, au bout de deux semaines, le métabolisme peut être affecté (baisse de la sensibilité à l’insuline, hausse du cholestérol LDL…), tout comme le système cardio-respiratoire. Une diminution de la marche qui peut aussi entraîner une augmentation du stockage des graisses et une prise de poids.

Ne pas négliger le mouvement

Pour atténuer les effets de ces postures statiques prolongées liées au télétravail, la stratégie tient en un mot : bouger. Il faut limiter le temps total passé en position assise à 7 heures maximum en s’activant toutes les 30 minutes, même de façon modérée. Pour ce faire, il est recommandé d’alterner les tâches pour s’éloigner régulièrement de son écran. Par exemple en passant ses coups de téléphone en marchant. Ou en déplaçant son ordinateur portable pour l’installer sur un buffet ou sur une étagère le temps d’une visioconférence afin d’y assister debout. S’autoriser des pauses, de préférence actives et courtes (levez-vous, étirez-vous), est une autre tactique pour ne pas rester assis trop longtemps. En marge de ces habitudes à prendre sur la journée de travail, il est important de maintenir une activité physique régulière - 30 minutes par jour pour les adultes suffisent - et d’adapter son alimentation à la baisse de dépense énergétique liée au confinement.

Quid du collectif ?

Le délitement des collectifs, le sentiment d’abandon ou encore la perte de sens du travail sont également à craindre en cette période de télétravail complet et imposé, accroissant encore les risques psycho-sociaux. S’il peut être très compliqué pour les managers d’animer leurs équipes à distance, leur rôle est pourtant essentiel dans le maintien de la cohésion des équipes et du sens du travail. Organiser des événements à distance impliquant tout le monde, qu’il s’agisse de réunions officielles ou de moments plus informels, doit permettre de conserver des liens. L’encadrement doit être à l’écoute des salariés sous sa responsabilité. Des points réguliers avec chacun d’entre eux, non pas pour surveiller leur activité mais bien pour les accompagner, est un bon moyen de faire le point par rapport à leur travail, ainsi que sur les conditions dans lesquelles ils l'exercent. Il est aussi important pour les managers d’être attentifs et de veiller à ce que chacun prenne bien part aux réunions, aux échanges, aux travaux proposés... Le moindre signe doit permettre de réagir avant que les problèmes ne s’aggravent.

Les effets potentiels du télétravail sur la santé sont donc multiples. En outre, tous les paramètres de cette organisation du travail sont difficilement maîtrisables par l’employeur qui ne peut intervenir sur le domicile de ses employés comme il le ferait sur ses locaux. Pour les nombreuses entreprises qui ont déjà réalisé une évaluation des risques liés au télétravail, il conviendra de vérifier s’il faut l’actualiser en raison des modalités spécifiques imposées par le confinement. Pour les entreprises qui « découvrent » le télétravail et afin de mettre en place les moyens de prévention adaptés, il est primordial pour mener une évaluation des risques efficace et constructive d’associer toutes les composantes de l’entreprise : les salariés, les encadrants, les instances représentatives du personnel (IRP), les services de santé au travail...

 

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