Les risques professionnels émergents entre droit du travail, de l’environnement et des assurances sociales

Classé dans la catégorie : Général

Une analyse d'un rapport de la DARES (Direction de l’Animation de la Recherche, des Etudes et des Statistiques) par Sébastien MILLET, avocat.

La DARES vient de publier le 7 septembre 2010 un rapport statistique sur les maladies professionnelles reconnues au titre de l’année 2007, qui analyse les pathologies les plus significatives et en dresse un panorama selon :

  • Leur nombre,
  • Leur gravité,
  • Les populations exposées selon les secteurs d’activité, les catégories professionnelles, l’âge et le sexe,
  • Leurs faits générateurs.

Certains constats sont particulièrement édifiants et rappellent qu’en 2010, on peut à long terme risquer sa vie au travail.

Une constante toutefois : les travailleurs ne sont pas égaux face aux risques de pathologies professionnelles, ce qui n’est pas nouveau, mais mérite d’être rappelé. Notons à cet égard qu’au-delà des débats qui agitent actuellement l’opinion concernant le projet gouvernemental de réforme des retraites, un embryon de réponse tend à être donné à la délicate question de la pénibilité (ainsi, outre la possibilité qui serait reconnue aux assurés sociaux souffrant d’un certain taux d’incapacité permanente de prendre une retraite anticipée à taux plein, un nouvel article L.4121-3-1 serait inséré dans le Code du travail d’après lequel « Pour chaque travailleur exposé à un ou plusieurs facteurs de risques professionnels déterminés par décret et liés à des contraintes physiques marquées, à un environnement physique agressif ou à certains rythmes de travail, l’employeur, en lien avec le médecin du travail, consigne dans des conditions fixées par décret les conditions de pénibilité auxquelles le salarié est exposé et la période au cours de laquelle cette exposition est survenue. (…) Une copie de ce document est remise au salarié à son départ de l’établissement »).

Le rapport de la DARES met également en lumière, chiffres à l’appui, le problème de santé publique central que représente l’amiante pour les professions qui y ont été exposées.

Face aux risques professionnels dits émergents, qui sont également identifiés par ce rapport même s’ils ne figurent pas –ou du moins pas encore– dans les tableaux des maladies professionnelles, on n’insistera jamais assez sur l’importance de la prévention en amont à tous les niveaux (conception, organisations, formation, … ).

Même si l’ensemble des parties prenantes sont concernées (salariés, représentants du personnel, médecine du travail, … ), la protection effective de la santé et l’action préventive dans l’entreprise repose en priorité sur l’employeur, au travers de l’obligation de sécurité (de résultat) mise à sa charge par la jurisprudence sociale (même si à l’origine – cf. les célèbres arrêts « amiante » de 2002, sa vocation était surtout de sanctionner la faute inexcusable et réparer les préjudices). Mais il y a un bémol au plan juridique : encore faut-il que l’employeur puisse avoir raisonnablement conscience du risque au regard des données scientifiques de l’époque … “à l’impossible, nul n’est tenu” (ceci étant en pratique, lorsqu’un risque commence à être notoirement identifié et connu, la prudence recommande au chef d’entreprise -ou à son délégataire- de mettre en oeuvre des moyens adaptés pour en limiter la survenance ou les effets).

Pour corriger cette situation, le principe de précaution trouve à s’appliquer lorsqu’il est question de l’environnement professionnel des travailleurs et fait obligation aux pouvoirs publics d’utiliser leurs compétences (réglementaires notamment), sans attendre la preuve scientifique que tel ou tel produit est inoffensif.

A titre d’exemple, on citera le cas des nanomatériaux (particules manufacturées à l’échelle de l’infiniment petit), dont les applications sont de plus en plus larges et qui suscitent de fait certaines inquiétudes : de nouvelles règles de prévention des risques pour la santé et l’environnement viennent d’être prévues malgré l’absence d’études épidémiologiques très significatives sur la question (cf. C. Env., L.523-1 et suivants). On peut espérer que l’information, l’évaluation et la réduction de l’exposition à ces substances permettra de mieux maîtriser ce risque et d’éviter un nouveau problème de santé public majeur.

Auteur : Sébastien MILLET (www.ellipse-avocats.com) pour Village de la justice

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